L’âme à l’amour tranché – Dénouer le destin d’inceste – Anne-Marie CLAIRE – 2021 _ Ed. L’harmattan

Quatrième de couverture

L’inceste est un problème sociétal. Il s’agit de reconnaître les victimes, de les accompagner, et de punir les incesteurs. Mais l’inceste, c’est la présence du mal au sexe du monde, en chacun de nous. C’est l’épreuve de la mort et de la souffrance, de l’amour et de la trahison, de la cruauté et de la jouissance. Les bourreaux sont aussi victimes et les victimes ne peuvent se contenter d’affirmer que le mal est extérieur à leur être. Le mal est un mystère qui nous traverse tous et n’appartient à personne. C’est l’épreuve de l’intolérable que nous taisons dans notre souci de préserver notre normalité et que nous transmettons à nos enfants, en toute inconscience. Cet intolérable, je dois le dire sans pudeur, l’offrir à la Joie. Seul ce qui est vécu pleinement peut être dépassé. J’écris pour effacer.

Chronique

L’inceste. Le mot est lâché. A travers une épreuve de la vie, l’auteure se rappelle. Un geste qui brise sa vie, son intimité. Un acte qui donne naissance à la honte face aux autres. Des émotions face à la perversité de certains qui l’entourent. Supporter leur regard. Leur mépris. Rester mutique pour ne pas briser la famille. Supporter le mutisme maternel, son manque d’empathie. Ce qui tue à petit feu. Cette douleur sexuelle ne peut se confier à personne. La solution est de tout garder au fond de soi et vivre. C’est ce que pensait l’auteure.

Mais le destin frappe à nouveau entrainant une grande sidération. Ce mal intime a touché ses enfants. Le puzzle se reconstitue. Il met en lumière des colères, des mutismes, l’éloignement. Elle n’a rien vu venir. Elle semble ne rien ressentir. Pourtant elle agit: en parler à la famille. Est-ce la solution contre le déni? Le refus de savoir? Cela va t-il éloigner la folie muette? La dépression profonde? Cet enfer vécu a touché la nouvelle génération. Après la sidération, vient le moment où l’auteure ne ressent rien car son âme est morte quelque part dans son enfance. Pourtant, ce père incestueux, elle l’aime encore et elle le hait autant que possible. Sa fille voit un psychiatre. L’auteure s’en veut de n’avoir rien vu tant elle était focalisée sur ses papillons et fourmis qui avaient investi son ventre.

L’auteure nous parle de l’inceste tel qu’elle l’a vécu en tant que victime. Son corps qui meurt. Ce corps livré à tout le monde tant la salissure fait partie d’elle. L’inceste est une histoire de famille: trois générations de femmes l’ont subi, dans l’indifférence maternelle ou dans l’ignorance. Des souvenirs qui reviennent, démontrant l’acharnement à vouloir détruire ce corps-tombeau, ce corps-néant, ce corps-poubelle. Mais, il faut faire comme si de rien n’était. Elle est une victime qui aime toujours son père-bourreau. Syndrome de Stockholm? Tant de douleurs, de maladies sans symptômes. Et ce silence coupable de ceux qui savent mais se taisent. Mais, il faut vivre. Survivre. C’est un roman fort. Bouleversant. Intime. Universel.

Note 18/20

9782343248400   L’Harmattan  Coll. Rue des écoles/libre champ    120p.    14€

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